Le journalisme, on l’aime… mais on le quitte

Journaliste, un fichu métier ? Des États-Unis nous arrivent ces derniers mois des informations semblant conforter l’idée.

La presse américaine a alimenté ces derniers mois une grosse polémique sur l’intérêt de choisir la carrière de journaliste. L’étude annuelle de Career Cast révélait que « journaliste » est le pire métier de 2015 (en 2014, il devançait seulement le bûcheron — la différence se jouant sur le seul critère du salaire).

Cette fois, c’est de Belgique qu’arrive la mauvaise nouvelle. Journalistes, la revue de l’Association des journalistes professionnels (AJP), présente un dossier de Jean-François Dumont qui se penche sur les raisons qui poussent les journalistes à quitter le métier.

La recherche, explique le site de la Fédération européenne des journalistes (FEJ) « se base sur un mémoire de fin d’études rédigé par Hélène Brédart pour l’Université de Liège à partir de trente-huit entretiens qualitatifs ». Il souligne que « la dégradation des conditions de travail et des pratiques journalistiques » découragent de plus en plus les journalistes à continuer leur métier.

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Voici les raisons qui, selon l’étude, poussent les journalistes à abandonner leur métier.

  • L’accumulation des tâches : le développement numérique et les mesures de restructuration ont alourdi la charge de travail des journalistes sans compensation financière
  • Le manque de temps : à cause de l’information à flux tendu, les journalistes ont moins de temps pour recouper les sources ou faire de l’investigation
  • La diversification des contenus : les journalistes ne peuvent plus se concentrer sur un seul média, l’obligation de produire rapidement des contenus pour plusieurs supports médiatiques (presse, audiovisuel, internet) affecte la qualité des contenus et la reconnaissance du savoir-faire.
  • L’évolution des contraintes éditoriales : la réduction des informations régionales, la nécessité de faire toujours « plus court » et la déformation des contenus sont vécues comme une dépossession de l’autonomie journalistique.
  • La lassitude : des journalistes estiment avoir « fait le tour » des informations ou expriment une lassitude par rapport à l’étroitesse du territoire à couvrir.
  • Le salaire : la rémunération, trop faible, est citée comme premier motif de départ, ainsi que l’absence d’augmentation barémique. Les directions ne tiennent pas leurs promesses,  aucune gratification n’accompagne la prise de nouvelles responsabilités. Les horaires et les congés ne sont pas respectés. Enfin, un stress quotidien accompagne les travailleurs.
  • Les synergies : les nouvelles collaborations entre les médias ont gravement affecté les journalistes indépendants.
  • Les horaires : les horaires lourds sont inhérents au métier mais ils sont vécus plus difficilement en radio où les journalistes sont requis de jour et de nuit. De fait, il reste peu de place pour concilier vie professionnelle, vie sociale et vie familiale.
  • Le moral : la morosité du secteur, l’effet de la crise financière et l’aigreur des aînés face aux changements affectent le moral des journalistes.

(NB : j’ai repris ici les différents points présentés par le rapport, en me permettant quelques réécritures).

Aux reproches traditionnels s’ajoutent les effets des nouvelles pratiques, d’autant plus pervers qu’ils attaquent davantage l’essence même du métier. Jamais le journalisme n’a été mis en danger par des horaires extensibles. Pas sûr qu’il résiste longtemps, sous sa forme actuelle, aux mutualisations, aux exigences d’immédiateté et à un développement numérique  parfois anarchique.

Mais il faut compter sur la passion et l’imagination, sans cesse renouvelées, pour ce métier.

Olivier Quelier.

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7 réflexions sur “Le journalisme, on l’aime… mais on le quitte

  1. Nicolas Vers dit :

    le salaire, la lassitude, les horaires,…sont des contraintes que l’on retrouvent dans de nombreux métiers !
    par contre pas l’abattement fiscal scandaleux dont vous bénéficier ….. no comment!
    les journalistes français sont des privilégiés ! point final.

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